jeudi 15 octobre 2009

[Conflit chez IAC: vous avez dit « procès politique » ?]

carte blanche à la délégation MWB - FGTB d'IAC (FIAT)

Se débarrasser de « gêneurs », briser la résistance des travailleurs et remettre en cause les procédures de concertation et de négociation sociales en vigueur: voilà les objectifs poursuivis depuis près d'un an par la direction d'IAC (Fiat, Bruxelles). Excusez du peu... Bref retour en arrière: depuis décembre 2008, nous nous opposons à la restructuration décidée par la direction et au licenciement de 24 travailleurs... dont 12 protégés par un mandat syndical. La direction veut fermer l'atelier de Meiser (Schaerbeek) et le magasin de Delta (Auderghem), deux de ses cinq sites à Bruxelles. Raison invoquée ? « Limiter les pertes ». Argument peu crédible: selon les chiffres dont nous disposons, ces pertes ne constituent qu'environ 7% du passif total des cinq sites.
[Et la voiture de la Reine, bordel ?]
Nous avons proposé de négocier un plan social. Refusé, au motif que les syndicats ont rejeté la levée préalable des protections syndicales. Pire: depuis le 18 juin, la direction a licencié 12 travailleurs. Parmi eux, pour l'anecdote, il y avait notamment le technicien qui s'occupe de la voiture de la Reine, ainsi que le meilleur technicien du Benelux et des mécaniciens et garnisseurs reconnus par l'importateur. Alors que d'autres personnes étaient prêtes à quitter l'entreprise ou à partir en prépension ! Que se passe-t-il en réalité ? La direction veut fractionner l'entreprise en 16 « divisions » pour pouvoir contourner la loi Renault et se débarrasser sans contraintes de ceux qui lui résistent. Elle a ainsi transféré les « gêneurs » d'un site à l'autre, pour les regrouper et les virer d'un bloc. Nous ne pouvions évidemment pas accepter cela. Nous avons donc décidé en mai dernier d'occuper l'atelier de Meiser. La direction nous a envoyé les huissiers, et nous avons été cités à comparaître devant le tribunal de première instance de Bruxelles. On a été délogés par la police, et la direction a décidé dans la foulée de licencier cinq d'entre nous pour « faute grave ». C'est monté de toutes pièces, mais c'est clair: action collective syndicale = faute grave... Depuis lors, la direction nous traîne en justice. Elle veut à tout prix faire sauter notre protection syndicale, en court-circuitant la Commission paritaire, seule compétente normalement pour lever éventuellement cette protection en cas de restructuration, après qu'un plan social ait été négocié. Ici, pas de négociation, pas de plan social: la direction veut passer en force. Elle remet ainsi fondamentalement en cause le rôle de la Commission paritaire et s'assied sur la législation en vigueur. Vous l'aurez compris: c'est un danger majeur pour la concertation sociale en Belgique, pour les droits syndicaux, pour les organisations syndicales et pour tous les travailleurs. C'est pour cela que nous parlons de « procès politique ». Demain, si la justice donne raison à la direction, c'est la protection des délégués contre les licenciements abusifs pour raisons économiques qui disparaît. Et les commissions paritaires que l'on transforme, désavouées, en coquilles vides. En créant un précédent pour une petite entreprise, on pourrait ainsi faire jurisprudence pour toutes les autres !
[Après Carrefour, Bridgestone, UCB…]
Au-delà de notre cas à nous, c'est la logique des astreintes, des huissiers, des attaques contre le droit de grève qui, aujourd'hui, tente de s'imposer partout. Rappelez-vous Carrefour, Bridgestone, UCB... Pas de hasard: l'avocat qui défend la direction d'IAC est le même que celui qui avait introduit les requêtes visant à lever les piquets de grève chez Carrefour... De plus en plus, on traîne les délégués devant les tribunaux, on veut faire d'eux des délinquants, des terroristes. On personnalise les attaques, on criminalise celles et ceux qui osent résister et se battre, et on s'assure ainsi la peur et la docilité des autres... Aujourd'hui, 10 mois après le début du conflit, on vit dans l'attente. L'atelier de Meiser est à l'arrêt, et 12 travailleurs se rongent les ongles. Toute l'activité de l'entreprise s'en ressent, à l'intérieur comme pour les clients. On est suspendus à la décision du tribunal du Travail, qui devrait tomber vers la fin octobre. On n'en serait pas là si la direction avait accepté de négocier un accord social. C'est une fuite en avant dangereuse pour tout le monde. D'autant plus qu'on se rapproche de la fin de l'année, et du Salon de l'auto. Pas terrible, pour l'image d'une marque, de tenir salon en faisant ouvertement la guerre à ses propres travailleurs...
[Appel à soutien !]
Jusqu'ici, nous avons été utilement soutenus par des camarades d'autres entreprises de garage, d'autres secteurs, et par l'organisation syndicale. Des délégations de Caterpillar, d’Opel Anvers et de la sidérurgie de Liège sont venues nous témoigner leur soutien. Mais il ne faut pas relâcher la pression. Nous sommes face à une injustice criante et un risque majeur. Si on accepte ça, alors il faut arrêter le syndicalisme.

Qu'on soit mécano chez IAC, sidérurgiste, postier ou producteur de lait, on est tous piétinés par les mêmes logiques. On est tous victimes de la même crise, du même système. Ce qu'il faut, désormais, c'est se mobiliser ensemble, tous secteurs confondus. Pour démontrer de manière éclatante la force de la FGTB, des travailleurs, et leur détermination à ne pas reculer.

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