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lundi 21 février 2011

[Non, le NPA n'est pas mort !]


Par Philippe Corcuff (sociologue),
Sandra Demarcq (membre du Conseil Politique National du NPA)
et Willy Pelletier (sociologue)

Valenciennes - 23.09.2010
Le « microcosme » bruisse d'une folle rumeur : le Nouveau Parti Anticapitaliste serait mort...alors qu'il réunissait seulement son premier congrès (11-13 février 2011, Montreuil). Certains murmurent : « enfin ! ». De jeunes gens pressés, éblouis par les caméras, confondent, dans leur enthousiasme neuf pour le Front de Gauche, ouverture politique et promesses de postes.
Certes, le NPA n'a pas tout à fait répondu aux ambitions de son congrès fondateur de février 2009. De nombreux adhérents sont partis, mais 6000 sont encore là (nettement plus que le Parti de Gauche). La très grande majorité des partants n'a d'ailleurs pas manifesté par là son désaccord avec une stratégie électorale. Plus prosaïquement, trouver sa place dans une organisation politique n'est pas si simple. Ce qui interroge les modalités prises par la forme « parti », les contraintes du militantisme, ce en quoi il peut être utile pour nourrir la dignité des opprimés et améliorer leur condition. Le NPA est un lieu contradictoire, avec des faiblesses et des atouts. De multiples débats le traversent, le déstabilisent, l'enrichissent, à l'image de nos vies ordinaires. Bref, c'est un lieu vivant, bien vivant ! 
Il faut être asservi au culte de l'immédiat pour diagnostiquer la fin irrémédiable d'un parti qui n'a que deux ans d'âge. Sur le marché politico-médiatique, les produits semblent se périmer aussi vite qu'ils naissent. Contre cette absorption dans l'immédiateté, le regretté Daniel Bensaïd appelait à trouver un « point de suture entre passé et futur » (dans Une radicalité joyeusement mélancolique, Textuel, 2010), en puisant dans la mémoire critique comme dans les ouvertures inédites de l'à venir. Pas pour fuir le présent, dans la nostalgie ou le rêve, mais pour s'y confronter : « le présent, et lui seul, commande le faisceau des "peut-être" », ajoutait-il. 
De ce point de vue, l'inédit historique ne se confond pas avec la mode, comme nous le montrent encore une fois les processus révolutionnaires en Tunisie et en Egypte. Nous avancerons alors plus prudemment que le NPA est encore à naître. Car le NPA n'est pas un parti « clé en main » : c'est un processus en cours. Une aventure originale a été lancée : celle de l'émergence d'un paradoxal parti libertaire, qui combine et met en tension les nécessités de l'organisation et celles de la non-professionnalisation politique. 
Une telle initiative questionne les évidences de la politique officielle : une politique anticapitaliste et non-professionnelle est-elle possible ? Pour qui rêve d'être ministre, député ou conseiller général, certes non ! La carrière politique et le capitalisme sont des conditions de leur activité, aussi invisibles et nécessaires que l'air qu'ils respirent. Pour qui croit que la politique est, avant tout, affaire d'engagement citoyen et d'activité populaire, oui ! Après les déconvenues du XXe siècle du point de vue des logiques de monopolisation des pouvoirs, des formes soft de la représentation politique professionnalisée aux barbaries bureaucratiques, comment envisager une autre politique qui ne s'adosserait pas à un autre rapport à la politique ? 
Car même nos démocraties représentatives, réglées par la concurrence entre professionnels de la politique, sont bien peu démocratiques. Le TCE fut ratifié  à Versailles et la loi sur les retraites votée contre la mobilisation de millions de citoyens. La gauche de l'avenir ne peut reproduire ces formes politiques traditionnelles. Il faut inventer une manière radicalement différente de pratiquer la politique à l'école des mouvements sociaux. 
C'est dans cette perspective que le NPA, avec des erreurs, des tâtonnements et des doutes, a commencé à ouvrir un chemin. Olivier Besancenot a su incarner cette timide possibilité d'une gauche de la rue qui ne déserte pas pour autant le terrain des élections. Mais en faisant de l'auto-organisation populaire le roc, et non la passive délégation aux divers hommes providentiels dont les médias abusent et qu'ils usent tout aussi rapidement. Pour que « la politique autrement » ne soit pas seulement un slogan marketing de plus pour des aspirants à la carrière politique en mal de « créneaux porteurs ». 
Faire de la politique en refusant les codes étriqués de la politique instituée : il y a peu d'endroits où une telle expérience fut tentée. C'est pourquoi, malgré le flot des bavardages funéraires, le NPA n'a pas dit son dernier mot. 

mardi 12 janvier 2010

jeudi 19 février 2009

Prenons Parti

Par Véronique Blaze, Chirurgien, ancienne Conseillère Communale, Mons - Pierre Denoël, Travailleur Social, ancien Conseiller Provincial - Léon Gosselain, militant Eco-Socialiste, conseiller communal honoraire à Ath – Freddy Mathieu, prépensionné, ancien Secrétaire Régional de la FGTB Mons-Borinage –
Alain Van Praet, militant syndical, CSC

Nous vivons en Belgique et nous venons de fonder, avec 9120 camarades, un parti politique en France. Nous adhérons au Nouveau Parti Anticapitaliste créé par la LCR et Olivier Besancenot. Pourquoi?
Simplement parce que nous avons en commun de grandes préoccupations, des engagements, des principes et surtout des espoirs.

Nos préoccupations
En Europe, notamment, la répartition des richesses est de plus en plus inégalitaire et se trouve renforcée par le recul de la part des salaires dans le PIB, au profit des revenus du capital. Entre 1975 et 2006, ce sont 1.200 milliards d’euros qui ont ainsi été enlevés aux travailleurs au profit des capitalistes. Au même moment, le taux de prélèvement moyen sur les bénéfices des entreprises est passé de 38% à 24%.
Ces revenus supplémentaires engrangés par les possédants n’ont pas été utilisés pour investir dans la production ou pour augmenter l’emploi, mais ils ont été distribués -pour l’essentiel- sous la forme de revenus financiers. La crise financière actuelle met en cause les ressorts essentiels du mode de production capitaliste.
C’est le profit qui guide toutes les décisions, à n’importe quel prix.
Et le prix du profit peut avoir pour nom : la misère, la guerre, des catastrophes écologiques ou des famines.
La mondialisation a remplacé les Etats régulateurs et mis directement en concurrence les travailleurs de tous les pays, brisant ainsi d’indispensables solidarités.
La crise actuelle fait voler en éclats ce modèle valorisé par l’idéologie néolibérale depuis 30 ans et nous montre ses limites, ses impasses et les catastrophes où il nous mène.
Cette période a également sonné le glas de la social-démocratie, tenante d’un réformisme sans réformes, convertie au dieu-marché et envoutée par sa main invisible. Dans toutes les phrases de ses discours elle a mis les entreprises capitalistes sur le même pied que les travailleurs, elle a râpé la Charte de Quaregnon, elle a caressé les oligarchies dans le sens du poil, elle s’est encanaillée dans les Conseils d’Administration, elle a pris des mesures de droite qu’elle a nommé de titres pompeux (consolidation stratégique pour les Services Publics, revenu d’insertion pour le minimex, activation du comportement de recherche pour la chasse aux chômeurs). Elle a imposé le pacte des générations, elle a donné l’absolution aux fraudeurs fiscaux, elle a laissé s’ouvrir des Centres Fermés, elle a laissé instaurer les « intérêts notionnels » -qui exonèrent les bénéfices des entreprises de la solidarité. Elle a remplacé la solidarité par la compassion, l’émancipation par la charité, l’internationalisme par les bons sentiments. Et certains de ses leaders ont même fini par se nicolasarcozier.
Et quand la bulle financière a éclaté, voici quelques semaines, les désormais socio-libéraux et leurs alliés, ont volé au secours du capitalisme et de ses banques en déroute, s’inscrivant dans une logique de gestion de la crise capitaliste sur le dos des citoyens.

Nos engagements
Cette crise va s’amplifier avec son cortège de licenciements, de reculs sociaux. Une nouvelle situation qui va provoquer de nouvelles confrontations sociales et politiques. Les explosions sociales en Grèce, en Italie, en France, en Guadeloupe, en Martinique en sont les prémices.
Il faut comprendre, encourager et accompagner « l’insurrection qui vient ».
Dans ce cadre, les anticapitalistes ont le devoir d’intervenir autour de solutions alternatives à la crise qui combinent mesures d’urgence pour l’emploi, les salaires, les services publics et mesures de transformations anticapitalistes.
Nous avons besoin d’une gauche de combat, décomplexée, allègre, fière de ses couleurs et porteuse d’espoir.
La LCR et Olivier Besancenot ont proposé de construire un nouveau parti pour résister à la droite de Sarkozy et au Medef (l’équivalent de la FEB en France).
Mais le capitalisme a depuis longtemps dépassé les futiles frontières nationales. C’est au moins à l’échelle de l’Europe que nous devons construire un parti pour lutter contre ceux qui exploitent, précarisent, détruisent l'environnement. Un parti qui permette d’en finir avec le racisme, le sexisme et toutes les oppressions. Un parti qui défende un projet de transformation révolutionnaire de la société, pour une rupture radicale avec un système dont nous n’avons rien à attendre.
La création du NPA est une occasion idéale pour concrétiser ce pôle conséquent à la gauche de la gauche, en France mais aussi en Europe.
En Belgique on devrait s’en inspirer et travailler résolument au dépassement du morcellement de la gauche anticapitaliste. La clarté politique et la radicalité doivent se marier avec la volonté de converger dans la construction d’une véritable alternative, à gauche du PS et d’Ecolo.
Nous sommes persuadés qu’une telle perspective est attendue par des milliers de progressistes, de militants socialistes, associatifs, écologistes, syndicalistes, qui cherchent une initiative, qui espèrent une alternative, qui veulent affirmer leurs valeurs d’émancipation.

Nos principes et nos espoirs
En nous inscrivant dans la dynamique du NPA nous n’avons pas demandé « l’asile politique » à la France, ni prôné le rattachisme ou l’assimilation, nous nous sommes simplement nourris d’un nouvel espoir.
Nous avons tellement de choses en commun et ça remonte à tellement longtemps...
C’est à Quaregnon, en 1893, que fut publié un des textes fondateurs pour les anticapitalistes, nous revendiquons cet héritage :
« Les richesses, en général, et spécialement les moyens de production, sont ou des agents naturels ou le fruit du travail — manuel et cérébral — des générations antérieures, aussi bien que de la génération actuelle; elles doivent, par conséquent, être considérées comme le patrimoine commun de l'humanité.
Le droit à la jouissance de ce patrimoine, par des individus ou par des groupes, ne peut avoir d'autre fondement que l'utilité sociale, et d'autre but que d'assurer à tout être humain, la plus grande somme possible de liberté et de bien-être.
La réalisation de cet idéal est incompatible avec le maintien du régime capitaliste, qui divise la société en deux classes nécessairement antagonistes : l'une, qui peut jouir de la propriété, sans travail; l'autre, obligée d'abandonner une part de son produit à la classe possédante.
Les travailleurs ne peuvent attendre leur complet affranchissement que de la suppression des classes et d'une transformation radicale de la société actuelle. Cette transformation ne sera pas seulement favorable au prolétariat, mais à l'humanité toute entière; néanmoins, comme elle est contraire aux intérêts immédiats de la classe possédante, l'émancipation des travailleurs sera essentiellement l’œuvre des travailleurs eux-mêmes… (1)
Il y a une semaine à Belém, en Amazonie, l’Assemblée des mouvements sociaux du Forum social mondial 2009 ne disait pas autre chose : « La crise capitaliste internationale qui porte préjudice à l’humanité s’exprime sur différents plans : c’est une crise alimentaire, financière, économique, climatique, énergétique, migratoire…, de civilisation qui accompagne la crise de l’ordre et des structures politiques internationales.
Nous sommes face à une crise globale provoquée par le capitalisme qui n’a pas d’issue au sein du système.
Ce système est régi par l’exploitation, la compétition exacerbée, la promotion de l’intérêt privé individuel au détriment de l’intérêt collectif et l’accumulation frénétique de richesses par une poignée de nantis. Cela génère des guerres sanglantes, alimente la xénophobie, le racisme et les extrémismes religieux, cela renforce l’exploitation des femmes et la criminalisation des mouvements sociaux. »
L’ancrage dans les meilleures traditions du Mouvement ouvrier nous permet de nous tourner résolument vers l’avenir. En ne négligeant aucun bilan : celui de tous les travers bureaucratiques, des errements dogmatiques, des catastrophes écologiques engendrées par le productivisme, également à l’œuvre dans les dictatures d’inspiration staliniennes/bureaucratiques soi-disant communistes.

Nos vies valent plus que leurs profits
Nous venons de fonder un nouveau Parti Anticapitaliste, comme dans la Charte de Quaregnon en 1894 « (il) …déclare qu'il se considère comme le représentant, non seulement de la classe ouvrière, mais de tous les opprimés, sans distinction de nationalité, de culte, de race ou de sexe. Que les socialistes de tous les pays doivent être solidaires, l'émancipation des travailleurs n'étant pas une œuvre nationale, mais internationale. Que, dans la lutte contre la classe capitaliste, les travailleurs doivent combattre par tous les moyens qui sont en leur pouvoir. » (1)
Nous proposons des objectifs de mobilisation destinée à remettre en cause le capitalisme et à préparer le socialisme qu’il faut inventer ensemble. En remettant en question la propriété privée des moyens de production (de transport, de communication, des banques etc.), en insistant sur l'appropriation sociale du produit du travail, et en imposant le contrôle démocratique des salariés et de la population sur l’ensemble de leurs conditions d’existence.
Dans l’immédiat, nous voulons populariser les mesures suivantes :
• Une société solidaire débarrassée de tous les discriminations
• Une réelle égalité entre femmes et hommes
• Le renforcement des services publics
• Une planification démocratique de la production, entre autre pour relever le défi de la crise écologique
• La lutte contre le chômage massif par la réduction radicale du temps de travail et la réorientation de l’économie vers la satisfaction des besoins sociaux, dans le respect de l’environnement
• La socialisation de tout le secteur financier

Certes le chemin de l’émancipation humaine est encore long. Mais c’est une raison supplémentaire pour ne pas tarder à l’emprunter… « Quand faut y aller, faut y aller » (2)


(1) Charte de Quaregnon - 1893. Résultat d'un travail de commissions installées à Gand, la déclaration de principes et le programme seront discutés au Congrès socialiste de Bruxelles les 25 et 26 décembre 1893 avant d'être adoptés lors du Congrès de Quaregnon des 25 et 26 mars 1894)
(2) « Salutations Révolutionnaires » de Ministère des Affaires Populaires -
http://www.map-site.fr/