lundi 25 août 2008

Toi ma petite phobie

De toutes parts on me presse de terminer mes vacances et de reprendre mes billets d’humeurs.
Je tiens à préciser que je ne suis pas en vacances (ni en retraite, seulement un peu en retrait) : je participe à un stage intensif de rienfoutisme.
D’autres étaient moins tristes de mon (relatif) silence car ils souffrent d’une maladie contagieuse : la blogophobie (et certains d’une variante encore plus aigüe, la fredditcelablogophobie). Ils n’aiment pas mes articles. D’ailleurs ils ne les lisent pas, convaincus qu’ils sont que ça risque de leur refiler le bourdon. C’est un peu comme ces gens, par ailleurs bien portants, mais qui font une crise d’angoisse chaque fois qu’ils lisent une notice de médicament ou suivent une émission télé sur une maladie rare. Ils se retrouvent dans tous les effets secondaires et dans tous les symptômes décrits.
Ils sont soulagés d’être en congé (chaque année du 21 juillet au 15 août).
Je ne voudrais pas gâcher leur retour à la vie normale, je leur indique donc quelques pistes de réflexion pour sortir de leurs angoisses.
« Une phobie est une peur déraisonnée et excessive, déclenchée en présence d’un élément spécifique, ou dans une situation donnée, sans qu’il y ait de danger immédiat. Les personnes sujettes à une phobie savent leur peur déraisonnable mais ne peuvent pas la contrôler. Généralement, les phobies ne gênent que modérément et disparaissent avec le temps. Elles s’avèrent plus perturbantes lorsqu’elles sont décuplées par l’angoisse de rencontrer l’objet de la peur et le souci de dissimuler celle-ci. Elles déclenchent des stratégies compliquées d’évitement et influent sur la vie sociale comme l’agoraphobie, peur des lieux publics, ou la claustrophobie, peur des lieux clos. » in
http://bloglouglou.wordpress.com/2008/05/04/blogophobie/
Voilà le décor de cette vie gâchée par les clics, les http, les www, les blogs, les facebook et les puces qui infectent leur matelas de bonne conscience.
Mais je tiens à les rassurer : il y a des gens encore plus atteints qu’eux. Pensez un instant à ces Éreutophobes, qui ont peur de rougir en public, ces Apopathodiaphulatophobes qui craignent d’être constipés et ces Hexakosioihexekontahexaphobes qui ont peur du nombre 666.
Voilà pourquoi je tenais à leur offrir cette merveilleuse chanson de Line Renaud : Toi ma petite phobie.
FRED



dimanche 22 juin 2008

Gouvernement de classe




► ► ► « Ils avaient prié, d’abord, mais ils n’avaient pas été exaucés, puis ils avaient timidement réclamé mais ils n’avaient pas été entendus. Ils avaient supplié, en vain.
Et voilà qu’ils s’étaient mis à exiger. »


Daniel Pennac « Le dictateur et le hamac » 2003


Les deux dernières semaines ont été marquées par des manifestations contre la baisse du pouvoir d’achat. Mais qu’on ne s’y trompe pas derrière la similitude des thèmes (« le mazout ») il y a de bien grandes différences à la fois entre les intérêts en jeu et la manière dont les gouvernants y ont réagi.
Visiblement, camions, taxis et tracteurs d’un côté et colossales manifestations syndicales de l’autre, n’ont pas eu le même écho…
"Le gouvernement accepte de prendre à bras le corps les coûts du carburant", a déclaré Olivier Neirynck, secrétaire général de la Brafco. Selon ce dernier, "des pistes intéressantes" ont été avancées par les différents ministres concernés par le dossier. Parmi ces idées, figure notamment l'octroi d'une réduction immédiate pour tout changement d'"outils de chauffe", une revendication de la Brafco. Les ministres Reynders et Laruelle ont également apporté leur soutien à certaines revendications fiscales proposées par les fédérations. » (18.06.08 - Belga)

A part la « compréhension » d’Yves Leterme au soir des manifs, on attend encore une ébauche de fifrelin d’ombre de réaction gouvernementale aux dizaines de milliers de travailleurs qui sont descendus dans la rue entre le 9 et le 12 juin ! Voilà qui démontre bien où sont ses centres d’intérêts sociaux et économiques. Rien de nouveau sous le soleil : les libéraux ont bien senti qui est qui dans les manifestations : les routiers c’est quand même des potes, ils manifestent avec leurs patrons et eux, ils ne sont pas machos, buveurs et « limités » comme cette racaille qui a déferlé sur les pavés de Wallonie…
On se demande seulement : où était la gôche? Au Gouvernement...

FRED

dimanche 15 juin 2008

Après le non irlandais


Banderolle de remerciement à L'Irlande pour son "NON" au traité de Lisbonne. A Quimper lors de la manifestation le 14 juin 2008 contre la fermeture de services dans les hôpitaux du Finistère. - Photothèque Rouge/esteban




"Si les Irlandais votent non, il n'y a plus de Traité de Lisbonne, c'est clair"

François Fillon, premier ministre français, la veille du référendum

« C’est un revers pour l’Europe mais ce résultat souligne le besoin urgent d’introduire un volet plus social et plus populaire dans les politiques européennes. Depuis beaucoup trop longtemps, l’Europe n’accorde pas assez d’importance aux attentes et aux droits des travailleurs et des autres citoyens qui se sentent menacés par la mondialisation et la rapidité des changements. Ce message lancé par l’Irlande tout comme celui lancé par la France et par les Pays-Bas il y a quelque temps, doit être pris en compte de façon urgente » a déclaré le Secrétaire Général de la Confédération Européenne des Syndicats (CES), John Monks.
Dès le non irlandais on a entendu beaucoup de commentateurs discourir sur le fait « qu’une petite minorité » bloquerait le processus européen. Il n’en reste pas moins que chaque fois que les projets de Traité Constitutionnel (le TCE, ou le Traité de Lisbonne) ont été soumis à un peuple par référendum, ils ont été rejetés… Et il y a gros à parier que si d’autres pays avaient consulté leur population, le non aurait aussi obtenu de forts résultats. Il y a de quoi se poser des questions en haut lieu !
Au lieu de cela, ces gouvernements, dont la Belgique, ont préféré consulter une autre « petite minorité » en limitant le débat aux parlementaires : si vénérables et représentatives soient les assemblées parlementaires, cela réduit considérablement le débat. Et le risque de « désinformation » évoqué une nouvelle fois dans le référendum irlandais, argument qu’on ne sert d’ailleurs qu’aux partisans du non, ne peut pas être contourné en supprimant toute information…
Déjà en mars, je publiais dans ce blog une lettre ouverte de Georges Debunne et ses amis, aux parlementaires qui disait notamment : « Une Constitution n’est pas un document de plus que l’on peut facilement jeter à la poubelle. Par ailleurs, dans notre démocratie, le citoyen pouvait s’attendre à ce que le gouvernement ait assuré une large diffusion de ce texte fondamental et que les autorités politiques aient organisé des débats politiques à grande échelle. Or, non seulement il n’a jamais été question d’une consultation populaire mais, de plus, le débat politique est en dessous de tout. Le débat parlementaire lui même risque d’être au niveau zéro à en croire la discussion hâtive et sans esprit critique qui a eu lieu au Sénat, la chambre de réflexion de notre pouvoir législatif.»
En l’absence de débat sérieux, approfondi, identifiant les enjeux, la démocratie se vide et il ne faut pas s’étonner de l’éloignement des populations de la chose politique. A force de se passer de leur avis, car pas assez intelligentes pour comprendre les briques qu’on leur sert (volontairement illisibles ?), on en revient à une sorte de vote censitaire(1) qui ne dirait pas son nom : une minorité de gens riches et instruits a plus de poids et de valeur que tout le peuple.
Cette nouvelle situation de blocage pour l’Europe appelle de nouvelles initiatives pour le monde du travail : d’abord un grand débat démocratique sur l’Europe que nous voulons, la définition d’objectifs sociaux, environnementaux et de démocratie mais aussi des avancées concrètes pour les travailleurs (un salaire minimum européen, un recours contre les restructurations et délocalisations et un socle commun de droits pour les travailleurs qui en sont victimes,…)
A cette sauce-là on redonnera envie aux populations européennes de construire notre Europe.
FRED

(1) En 1830, le vote est censitaire : ne peuvent dès lors voter que les hommes qui pourront payer le cens, ou 'quota d'impôt'. Réservé à une élite qui plus est exclusivement masculine, car on considérait que seuls les individus ayant les capacités (intelligence, niveau économique) d'exercer cette activité peuvent l'exercer : selon cette théorie seuls « les actionnaires de la grande société » seraient suffisamment légitimes pour exercer l'activité de vote. Moins d'un Belge sur cent pouvait voter à cette date.