dimanche 8 mars 2009

Royaume-Uni : la grande peur de la lutte des classes

En préparation d’une série d’article sur les mouvements sociaux en Europe, je voudrais revenir sur des grèves au Royaume-Uni début février qui ont été présentées comme des manifestations de racisme. Je vous livre l’analyse de Philippe Marlière qui contredit cette interprétation.

La BBC est sans aucun doute la meilleure télévision au monde. Ses programmes sont dans l’ensemble de qualité et sa ligne éditoriale est plutôt pluraliste et centriste. C’est un fait rarissime dans un monde de médias bêtifiants et de droite. Cependant, trois sujets échappent à ce modus operandi. Sur les ondes de la BBC, il n’est guère permis de critiquer la famille royale, la politique étrangère de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis ou la marche capitaliste du monde. Des événements récents ont concerné le troisième de ces interdits majeurs.
Début février, des "grèves sauvages" (Wildcat strikes) ont éclaté dans les raffineries Total et dans des centrales électriques à travers le pays. Les travailleurs britanniques protestaient contre le recours à une main-d’œuvre italienne et portugaise (employée à des salaires inférieurs aux normes locales), qui entraînait leur mise au chômage, puisque les emplois étaient réservés aux travailleurs étrangers.
Gordon Brown et Peter Mandelson sont montés au créneau pour dénoncer la nature "xénophobe" de ces grèves.
Une interview tronquée
La BBC, toujours servile en pareil cas, leur a emboîté le pas. Une interview de gréviste diffusée sur la BBC1 a été tronquée. On pouvait succinctement entendre un gréviste affirmer: "On ne peut pas travailler avec des Portugais et des Italiens." Le même reportage a été retransmis en intégralité sur la BBC2. Cette fois-ci, on pouvait entendre: "On ne peut pas travailler avec des Portugais et des Italiens; on est complètement séparés d’eux, ils viennent avec leurs propres compagnies." Les éditeurs du programme de la BBC ont tronqué une réponse de gréviste pour en altérer radicalement le sens. Dans le premier cas, la réponse apparaît motivée par le rejet de l’étranger et la fermeture à l’immigration. Dans la vraie version, il n’en est rien: le gréviste rapporte des faits, c’est-à-dire qu’il n’est pas possible de côtoyer les travailleurs étrangers, car ils arrivent avec l’entreprise qui les emploie et qu’on les tient volontairement à l’écart de la main-d’œuvre locale. La BBC, confrontée à une question politiquement sensible, est devenue le porte-parole d’un gouvernement hostile aux droits des travailleurs. Car ce que craint Gordon Brown, c’est le renouveau de la combativité salariale et syndicale.
Tony Blair et Gordon Brown n’ont en effet pas défait la législation du travail thatchérienne. Dans le monde occidental, la Grande-Bretagne est le pays qui restreint toujours le plus sévèrement le droit de grève.
Derek Simpson, le coleader du syndicat Unite, a dit les choses clairement : "Ces grèves n’ont rien à voir avec le racisme ou l’immigration. C’est une question de classe."
Il est tentant de préciser le propos : ces grèves britanniques sont une question de lutte des classes. Karl Marx considérait que la lutte des classes s’organisait autour d’une classe capitaliste qui détenait le capital, dirigeait et gérait la production et, enfin, s’appropriait la plus-value correspondant à l’exploitation du labeur des travailleurs. Depuis l’époque victorienne, rien de nouveau sous le soleil de l’exploitation capitaliste! En décembre 2007, la Cour européenne de justice (CEJ) avait abondé dans ce sens avec deux arrêts qui avaient fait beaucoup de bruit. L’arrêt Laval avait interdit aux syndicats d’agir contre les entreprises qui refusent d’appliquer à leurs salariés détachés dans un autre pays communautaire, les conventions collectives applicables dans ce pays. L’arrêt Viking avait estimé que le droit de recourir à des pavillons de complaisance procède de la liberté d’établissement garantie par le droit européen. La CEJ en avait conclu que la lutte des syndicats contre ces pavillons est de nature à porter atteinte à cette liberté fondamentale.
De la xénophobie imaginaire
"Les emplois britanniques aux travailleurs britanniques": c’est un vieux slogan du British National Party (BNP), une formation d’extrême droite. Il a récemment été repris par Gordon Brown, le très néolibéral Premier ministre, jamais à court de promesses démagogiques. Ces mots empoisonnés ont été lancés au visage du démagogue par les grévistes qui ont demandé avec ironie qu’il tienne sa promesse! La xénophobie dénoncée par le New Labour et la BBC était imaginaire. Les grévistes n’ont exercé aucun chantage sur les travailleurs italiens et portugais non-syndiqués, sous-contractés, sous-payés, ni n’ont exigé leur rapatriement. Les cibles de leurs critiques ont été les employeurs et leur course au dumping social, ainsi que le gouvernement qui les soutient dans cette entreprise. Les militants du BNP qui avaient tenté d’infiltrer les grèves à la raffinerie de Lindsey dans le Lincolnshire ont été éconduits et on a même vu une affiche portant l’inscription suivante: "Travailleurs dans le monde, unissez-vous!" Dans la centrale électrique de Plymouth, les grévistes ont revendiqué les mêmes droits pour tous les travailleurs –britanniques et étrangers– dénoncé l’exploitation d’une main-d’œuvre étrangère, et exigé que les travailleurs britanniques ne soient pas écartés du marché du travail. Gordon Brown, dont la politique économique a amené le pays au bord de la faillite, a répété le mot d’une interview à une autre: "Protectionnisme!" Une majorité de Britanniques considèrera que c’est la parade désespérée d’un gouvernement incapable de raisonner en dehors des mots d’ordre des années 80 et 90: "Dérégulation! Libre entreprise! Flexibilité!"
Le New Labour agonise, mais ces travailleurs en lutte ont décidé de prendre leur destin en main. Bien leur en a pris. A Lindsey, les grévistes se sont vus accorder le double du nombre d’emplois que Total avait initialement offert; ceci sans qu’aucun travailleur italien ne soit renvoyé.
Philippe Marlière Maître de conférences à Londres 11/02/2009

samedi 7 mars 2009

Crise : la fête aux femmes...

Alors que le chômage monte en flèche partout dans le monde, la question de l'égalité professionnelle semble être reléguée au placard. Mais la Journée mondiale de la Femme du 8 mars replace le sujet sous les projecteurs. Un rapport du BIT (Bureau international du travail) publié à cette occasion tire la sonnette d'alarme. "L'impact de la crise économique mondiale (...) en termes de taux de chômage risque d'être plus néfaste pour les femmes que les hommes dans la plupart des régions du monde", indique l'étude. L'organisation chiffre à 22 millions le nombre de femmes qui pourraient perdre leur emploi en 2009 sur les 52 millions de chômeurs supplémentaires attendus. Le taux de chômage des femmes est passé de 6% en 2007 à 6,3% en 2008. Il devrait atteindre "au moins 6,5% selon le scénario le plus optimiste, et 7,4% pour le plus pessimiste", et même 7,8% dans les pays développés, détaille le rapport consacré aux tendances globales de l'emploi des femmes 2009. Le scénario "le plus optimiste" repose sur les prévisions de croissance mondiale de 0,5% formulées par le Fond monétaire international (FMI) en janvier.

mercredi 4 mars 2009

Guadeloupe - LKP - Au 43eme jour de la grève, Rosan Mounien fait le point....

Jodila kanmawad, certains d’entre nous se posent La question : Où en sommes-nous ? Pourquoi ne sommes-nous pas encore parvenus à signer un protocole ? Ne faisons-nous pas trop traîner les choses ? Ne faisons-nous pas trop durer le plaisir ? Nous répondons non.
Comme nous l’avons toujours dit dans le cadre de ce mouvement (LKP), si l’Etat et si les responsables de l’Etat au plus haut niveau s’étaient hissés au niveau de leurs responsabilités, cette grève aurait été suspendue dès le 9 février et le travail aurait repris le 10 février.
Si les négociations ont échoué, c’est parce qu’ils ont tenté de nous faire des crocs en jambe, de glisser des peaux de bananes sous nos pieds... Et chaque fois que l’on pensait avoir trouvé un point d’accord avec eux, le lendemain ils changeaient ou pratiquaient la chaise vide.
Ils ont cru que le mouvement aurait faibli, que le peuple se serait démobilisé. Ils ont cherché par tous les moyens à affaiblir le mouvement et à nous provoquer : Ils ont tenté de nous frapper : nous n’avons pas répondu... Ils ont tenté de nous emprisonné : mais ils se sont rendu compte que leurs geôles étaient trop petites pour contenir 60, 70000, 100000 personnes... ils se sont organisé pour que, comme tout au long de l’histoire de notre peuple, arrivé à un certain niveau de notre mouvement, que nous perdions un de nos un fils, une de nos filles, par le sang. Ils ont cru que le décès de Jacques BINO aurait été un moyen susceptible d’arrêter le mouvement de grève.
Mais ce qu’ils ignorent c’est que lorsqu’un peuple se lève, lorsqu’il prend conscience, lorsqu’il sait qu’il a raison dans ses actions... il n’y a rien qui puisse l’arrêter. Il balaye tous les obstacles placés sur sa route, comme un cyclone charrie et nettoie toutes les malpropretés d’un pays.
C’est pourquoi camarades, nous avons mené ces négociations avec méthode. Et à chaque fois que par leur propagande ils tentaient de faire croire que nous ne voulions pas sortir de ce conflit, nous tous pouvions constater que les seuls à vouloir sortir de ce conflit, c’est précisément nous. Vous voyez bien que dans toutes nos réunions et rencontres, nous avons mis en place un secrétariat. Une camarade chargée de prendre des notes et de transcrire tout ce qui se dit et fait sur un ordinateur portable. Et vous constatez que dans toutes les réunions, le seul ordinateur portable observable sur la table des négociations, c’était celui du LKP. Pour noter point par point ce qui sortait des échanges.
A notre arrivée aux négociations, le samedi 28 février dernier, nous leur avons demandé de mettre en place un secrétariat : parce qu’il s’agissait d’acter un certain nombre de points. L’Etat français, un pays de 56 millions d’habitants, sinon plus, un grand pays, qui se fait passer pour une puissance mondiale, était incapable de mettre en place un secrétariat en mesure de produire à la fin d’une réunion un texte reprenant tous les points d’accord. Il n’était pas capable de faire cette simple chose!
Et quand à 4 heures du matin, nous leur avons dit : voilà, nous sommes prêts, où est donc le protocole qu’ils proposaient ? Nous avons alors eu à constater leurs mines défaites par 10 heures de négociations. Alors que nous nous étions préparés pour négocier durant 3 jours, non stop, si nécessaire [1] . Parce que nous avons été missionné par un peuple en lutte et que nous ne pouvions faillir à nos responsabilités. Eh bien, non seulement ils n’avaient aucun projet de protocole d’accord à proposer à la fin de la réunion, mais en plus, dimanche dernier, où étaient-ils donc ? Nous, nous travaillions ! Nous, nous nous préparions. Nous leur avons redemandé le projet de protocole.
Or pendant que les négociations se poursuivaient le préfet glissait une nouvelle fois par une porte dérobée... Pour faire une conférence de presse pour annoncer la fin d’un mouvement ! Comme si c’est lui qui avait lancé le mouvement et que c’est lui qui décidait de sa fin ! Nous voyons là aussi l’incompétence, l’irresponsabilité et la méchanceté dans le comportement dans leur comportement.
Dimanche donc, rien. Pas de document. Nous avons alors pensé que lundi matin un document nous aurait été transmis : nous les avons appelé. Pas de document. Nous avons attendu. Nous avons reçu le document à trois heures de l’après-midi. En parallèle des camarades chargés des négociations sectorielles ayant débuté le lundi 02 mars, nous avons mis en place une équipe et travaillé sur le projet de protocole qui nous a été adressé et qui comporte 10 pages, et 125 articles.
Nous l’avons lu en long et en large puis avons travaillé dessus article par article de 3 heures de l’après-midi à 9 heures du soir.
Qu’avons-nous constaté ?
Un : qu’il est rédigé dans un mauvais français. Deux : qu’ils y ont fait figurer ce que bon leur semblait, tout en oubliant plus de 50 articles. Trois : qu’ils y ont inclu des centaines de clous rouillés destinés, si l’un venait à vous piquer, à vous fourguer le tétanos.
Nous avons alors pris le protocole pour le dépoussiérer, le nettoyer, le désinfecter et nous leur avons fait une contre-proposition : de 125, nous sommes passés à 177 articles. Pourquoi ? Parce que pour chaque réunion, nous avons les relevés de décisions ; nous avons tout ce qui a été dit par chacun des participants ; et ce qui a été arrêté dans les réunions.
A 21 heures 30 nous avons renvoyé le document au préfet. Mis en difficulté par ce notre document exhaustif, il a alors proposé la mise en place d’une commission de lecture et d’harmonisation. C’est ainsi que nous avons envoyé en préfecture une délégation à Basse-Terre composée de Elie DOMOTA et de Gaby CLAVIER, accompagnées de la secrétaire du LKP, Nathalie. En parallèle, un groupe d’experts a été chargé de travailler ici même sur le protocole pour effectuer les dernières corrections, en lien avec les trois camarades présents à la préfecture.
Et pas à pas, nous avançons... Ce travail, camarades se poursuit et devrait s’achever ce soir. Et demain, quand nous arriverons à 11 heures au port autonome de Pointe à Pitre, (où nous proposons que les négociations se poursuivent, puisqu’elles y ont commencé), ce sera pour une seule chose : signer !
Sortis d’on ne sait où, ces messieurs on cru, parce que nous étions des petits nègres, parce nous parlons créole, qu’ils pourraient faire ce qu’ils veulent de nous. Nous avons dit non ! Notre force c’est le liyannaj, cette union qu’il y a entre nous et le peuple. Car ce peuple, notre peuple a déjà trop souffert, il a déjà trop porté et supporté des profitants. Et lorsqu’on observe ceux à qui il confie les rênes du pouvoir, ceux-ci ne font pas face aux responsabilités confiées par le peuple.
Nous disons que pour une fois, pour une fois dans un pays comme la Guadeloupe où tout le peuple est debout, mobilisé et sait ce qu’il veut, il faut qu’il trouve en face de lui des hommes et des femmes capables de le guider dans le combat ; mais de ne pas prendre sa place et surtout de ne pas faire n’importe quoi lorsqu’on prétend parler en son nom !
C’est pourquoi camarades, toutes les conditions sont aujourd’hui réunies pour que nous remportions une grande victoire dans ce combat. Et faisons en sorte, de la même manière que le combat mené par Obama aux Etats-Unis a servi d’exemple pour tous les Noirs de la planète, que le combat mené par le peuple de Guadeloupe serve d’exemple pour tous les travailleurs et tous les peuples de la Terre luttant contre les pwofitasyon.
Ce n’est pas un hasard : si pendant un mois la presse internationale s’est rendue en Guadeloupe, c’est qu’elle s’est rendue compte qu’il y avait quelque chose qui s’y produisait, et qui ne ressemblait à rien de ce qui s’est déjà produit en quelque autre point de la planète.
Aujourd’hui, nous devons avoir la fierté d’être Guadeloupéen. Le peuple guadeloupéen est un peuple debout ! Ils cesseront de nous mépriser et de nous tourner en bourrique ! Et ceux qui croyaient pouvoir nous mener où bon leur semble, et bien aujourd’hui, il faudra qu’ils aillent se cacher. Car lorsque le peuple se lèvera ils auront des comptes à lui rendre !
Désormais, plus rien ne se fera comme avant ! C’est fini ! Nous nous sommes rendu compte que lorsque nous sommes ensemble, nous sommes plus forts ! Alors il ne nous reste qu’une chose à faire : rester ensemble !
Jou nou ké mété a jounou, péké vwè jou !
Nou ké gannyé konba !

mardi 03 mars 2009

samedi 28 février 2009

Ma boîte-aux-lettres vous intéresse ?

Je guettais le facteur. Le temps était gris et maussade. J’espérais une carte des tropiques (la Guadeloupe, en ce moment j’aime bien…).
C’est une enveloppe qu’il a glissé, pas de nom d’expéditeur, seulement une adresse : avenue de la Toison d’Or, Bruxelles. Les quartiers huppés.
La première impression a été vite confirmée : Didjé et Riche Hard m’écrivent : « l’économie belge a besoin de ses entrepreneurs ».
Ohé, les stroumphs, vous allez me gâcher ma journée… me suis-je dit en commençant la vaisselle.
Dans l’autre boîte, celle de l’ordi, je reçois des nouvelles à première vue plus sympas. C’est la newsletter du fameux Club de Mons-Hainaut, de retour de Samara. Samedi on reçoit Anvers, je me suis empressé d’ouvrir ce mail.
Patatras ! L’autre Didjé (de Frameries) m’invite… le 6 mars à la mons.arena pour « un moment convivial ». Mais c’est un détournement de truc ce machin, et en plus ils m’appellent « Undisclosed-Recipient » -récipient toi-même ! Heureusement pour elle la vaisselle était finie.
Mais comment font-ils pour trouver votre adresse ? Qui leur permet d’entrer dans votre boîte ? Pourquoi se cachent-ils dans une enveloppe anonyme ou dans la newsletter d’un club de sport ? Ça n’a pas l’air bien catholique tout ça (enfin ceux-là ils ne valent pas mieux, nom d’une pape).
Je me demande si je n’écrirais pas une humeur là-dessus.
fRED

jeudi 19 février 2009

Prenons Parti

Par Véronique Blaze, Chirurgien, ancienne Conseillère Communale, Mons - Pierre Denoël, Travailleur Social, ancien Conseiller Provincial - Léon Gosselain, militant Eco-Socialiste, conseiller communal honoraire à Ath – Freddy Mathieu, prépensionné, ancien Secrétaire Régional de la FGTB Mons-Borinage –
Alain Van Praet, militant syndical, CSC

Nous vivons en Belgique et nous venons de fonder, avec 9120 camarades, un parti politique en France. Nous adhérons au Nouveau Parti Anticapitaliste créé par la LCR et Olivier Besancenot. Pourquoi?
Simplement parce que nous avons en commun de grandes préoccupations, des engagements, des principes et surtout des espoirs.

Nos préoccupations
En Europe, notamment, la répartition des richesses est de plus en plus inégalitaire et se trouve renforcée par le recul de la part des salaires dans le PIB, au profit des revenus du capital. Entre 1975 et 2006, ce sont 1.200 milliards d’euros qui ont ainsi été enlevés aux travailleurs au profit des capitalistes. Au même moment, le taux de prélèvement moyen sur les bénéfices des entreprises est passé de 38% à 24%.
Ces revenus supplémentaires engrangés par les possédants n’ont pas été utilisés pour investir dans la production ou pour augmenter l’emploi, mais ils ont été distribués -pour l’essentiel- sous la forme de revenus financiers. La crise financière actuelle met en cause les ressorts essentiels du mode de production capitaliste.
C’est le profit qui guide toutes les décisions, à n’importe quel prix.
Et le prix du profit peut avoir pour nom : la misère, la guerre, des catastrophes écologiques ou des famines.
La mondialisation a remplacé les Etats régulateurs et mis directement en concurrence les travailleurs de tous les pays, brisant ainsi d’indispensables solidarités.
La crise actuelle fait voler en éclats ce modèle valorisé par l’idéologie néolibérale depuis 30 ans et nous montre ses limites, ses impasses et les catastrophes où il nous mène.
Cette période a également sonné le glas de la social-démocratie, tenante d’un réformisme sans réformes, convertie au dieu-marché et envoutée par sa main invisible. Dans toutes les phrases de ses discours elle a mis les entreprises capitalistes sur le même pied que les travailleurs, elle a râpé la Charte de Quaregnon, elle a caressé les oligarchies dans le sens du poil, elle s’est encanaillée dans les Conseils d’Administration, elle a pris des mesures de droite qu’elle a nommé de titres pompeux (consolidation stratégique pour les Services Publics, revenu d’insertion pour le minimex, activation du comportement de recherche pour la chasse aux chômeurs). Elle a imposé le pacte des générations, elle a donné l’absolution aux fraudeurs fiscaux, elle a laissé s’ouvrir des Centres Fermés, elle a laissé instaurer les « intérêts notionnels » -qui exonèrent les bénéfices des entreprises de la solidarité. Elle a remplacé la solidarité par la compassion, l’émancipation par la charité, l’internationalisme par les bons sentiments. Et certains de ses leaders ont même fini par se nicolasarcozier.
Et quand la bulle financière a éclaté, voici quelques semaines, les désormais socio-libéraux et leurs alliés, ont volé au secours du capitalisme et de ses banques en déroute, s’inscrivant dans une logique de gestion de la crise capitaliste sur le dos des citoyens.

Nos engagements
Cette crise va s’amplifier avec son cortège de licenciements, de reculs sociaux. Une nouvelle situation qui va provoquer de nouvelles confrontations sociales et politiques. Les explosions sociales en Grèce, en Italie, en France, en Guadeloupe, en Martinique en sont les prémices.
Il faut comprendre, encourager et accompagner « l’insurrection qui vient ».
Dans ce cadre, les anticapitalistes ont le devoir d’intervenir autour de solutions alternatives à la crise qui combinent mesures d’urgence pour l’emploi, les salaires, les services publics et mesures de transformations anticapitalistes.
Nous avons besoin d’une gauche de combat, décomplexée, allègre, fière de ses couleurs et porteuse d’espoir.
La LCR et Olivier Besancenot ont proposé de construire un nouveau parti pour résister à la droite de Sarkozy et au Medef (l’équivalent de la FEB en France).
Mais le capitalisme a depuis longtemps dépassé les futiles frontières nationales. C’est au moins à l’échelle de l’Europe que nous devons construire un parti pour lutter contre ceux qui exploitent, précarisent, détruisent l'environnement. Un parti qui permette d’en finir avec le racisme, le sexisme et toutes les oppressions. Un parti qui défende un projet de transformation révolutionnaire de la société, pour une rupture radicale avec un système dont nous n’avons rien à attendre.
La création du NPA est une occasion idéale pour concrétiser ce pôle conséquent à la gauche de la gauche, en France mais aussi en Europe.
En Belgique on devrait s’en inspirer et travailler résolument au dépassement du morcellement de la gauche anticapitaliste. La clarté politique et la radicalité doivent se marier avec la volonté de converger dans la construction d’une véritable alternative, à gauche du PS et d’Ecolo.
Nous sommes persuadés qu’une telle perspective est attendue par des milliers de progressistes, de militants socialistes, associatifs, écologistes, syndicalistes, qui cherchent une initiative, qui espèrent une alternative, qui veulent affirmer leurs valeurs d’émancipation.

Nos principes et nos espoirs
En nous inscrivant dans la dynamique du NPA nous n’avons pas demandé « l’asile politique » à la France, ni prôné le rattachisme ou l’assimilation, nous nous sommes simplement nourris d’un nouvel espoir.
Nous avons tellement de choses en commun et ça remonte à tellement longtemps...
C’est à Quaregnon, en 1893, que fut publié un des textes fondateurs pour les anticapitalistes, nous revendiquons cet héritage :
« Les richesses, en général, et spécialement les moyens de production, sont ou des agents naturels ou le fruit du travail — manuel et cérébral — des générations antérieures, aussi bien que de la génération actuelle; elles doivent, par conséquent, être considérées comme le patrimoine commun de l'humanité.
Le droit à la jouissance de ce patrimoine, par des individus ou par des groupes, ne peut avoir d'autre fondement que l'utilité sociale, et d'autre but que d'assurer à tout être humain, la plus grande somme possible de liberté et de bien-être.
La réalisation de cet idéal est incompatible avec le maintien du régime capitaliste, qui divise la société en deux classes nécessairement antagonistes : l'une, qui peut jouir de la propriété, sans travail; l'autre, obligée d'abandonner une part de son produit à la classe possédante.
Les travailleurs ne peuvent attendre leur complet affranchissement que de la suppression des classes et d'une transformation radicale de la société actuelle. Cette transformation ne sera pas seulement favorable au prolétariat, mais à l'humanité toute entière; néanmoins, comme elle est contraire aux intérêts immédiats de la classe possédante, l'émancipation des travailleurs sera essentiellement l’œuvre des travailleurs eux-mêmes… (1)
Il y a une semaine à Belém, en Amazonie, l’Assemblée des mouvements sociaux du Forum social mondial 2009 ne disait pas autre chose : « La crise capitaliste internationale qui porte préjudice à l’humanité s’exprime sur différents plans : c’est une crise alimentaire, financière, économique, climatique, énergétique, migratoire…, de civilisation qui accompagne la crise de l’ordre et des structures politiques internationales.
Nous sommes face à une crise globale provoquée par le capitalisme qui n’a pas d’issue au sein du système.
Ce système est régi par l’exploitation, la compétition exacerbée, la promotion de l’intérêt privé individuel au détriment de l’intérêt collectif et l’accumulation frénétique de richesses par une poignée de nantis. Cela génère des guerres sanglantes, alimente la xénophobie, le racisme et les extrémismes religieux, cela renforce l’exploitation des femmes et la criminalisation des mouvements sociaux. »
L’ancrage dans les meilleures traditions du Mouvement ouvrier nous permet de nous tourner résolument vers l’avenir. En ne négligeant aucun bilan : celui de tous les travers bureaucratiques, des errements dogmatiques, des catastrophes écologiques engendrées par le productivisme, également à l’œuvre dans les dictatures d’inspiration staliniennes/bureaucratiques soi-disant communistes.

Nos vies valent plus que leurs profits
Nous venons de fonder un nouveau Parti Anticapitaliste, comme dans la Charte de Quaregnon en 1894 « (il) …déclare qu'il se considère comme le représentant, non seulement de la classe ouvrière, mais de tous les opprimés, sans distinction de nationalité, de culte, de race ou de sexe. Que les socialistes de tous les pays doivent être solidaires, l'émancipation des travailleurs n'étant pas une œuvre nationale, mais internationale. Que, dans la lutte contre la classe capitaliste, les travailleurs doivent combattre par tous les moyens qui sont en leur pouvoir. » (1)
Nous proposons des objectifs de mobilisation destinée à remettre en cause le capitalisme et à préparer le socialisme qu’il faut inventer ensemble. En remettant en question la propriété privée des moyens de production (de transport, de communication, des banques etc.), en insistant sur l'appropriation sociale du produit du travail, et en imposant le contrôle démocratique des salariés et de la population sur l’ensemble de leurs conditions d’existence.
Dans l’immédiat, nous voulons populariser les mesures suivantes :
• Une société solidaire débarrassée de tous les discriminations
• Une réelle égalité entre femmes et hommes
• Le renforcement des services publics
• Une planification démocratique de la production, entre autre pour relever le défi de la crise écologique
• La lutte contre le chômage massif par la réduction radicale du temps de travail et la réorientation de l’économie vers la satisfaction des besoins sociaux, dans le respect de l’environnement
• La socialisation de tout le secteur financier

Certes le chemin de l’émancipation humaine est encore long. Mais c’est une raison supplémentaire pour ne pas tarder à l’emprunter… « Quand faut y aller, faut y aller » (2)


(1) Charte de Quaregnon - 1893. Résultat d'un travail de commissions installées à Gand, la déclaration de principes et le programme seront discutés au Congrès socialiste de Bruxelles les 25 et 26 décembre 1893 avant d'être adoptés lors du Congrès de Quaregnon des 25 et 26 mars 1894)
(2) « Salutations Révolutionnaires » de Ministère des Affaires Populaires -
http://www.map-site.fr/