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jeudi 17 mai 2012

[A gauche, le débat enfin ouvert ?]


A gauche, le débat enfin ouvert ?
Le 1er mai 2012 fera date pour la gauche en Belgique. Dans des échos publiés la veille et dans son discours le 1er mai face aux militants rassemblés devant la FGTB carolo, le Secrétaire Régional, Daniel Piron, a exprimé avec force et clarté ce que des centaines de militants syndicaux ne cessent de se répéter depuis des années : le syndicalisme est orphelin, ses « relais politiques naturels » le Parti Socialiste et (dans une moindre mesure) Ecolo, ont achevé leur conversion au libéralisme économique et se contentent dès lors « d’accompagner » le capitalisme et de soigner ses crises à répétition avec de la poudre de perlimpinpin.
Ce que vivent chaque jour les travailleur(se)s et leurs déléguéEs, c’est l’extrême sauvagerie de ce système inhumain : restructurations, licenciements, durcissement des conditions de travail, exclusion, racisme et précarité à tous les étages, mise en concurrence des travailleurs, chômage massif, politiques d’austérité, attaques contre les conquêtes sociales, contre les services publics, etc.… ne sont que le résultat de la course au profit qui est le fondement même du système. Daniel Piron le proclame « Il nous faut, et je sais, chacun d’entre nous, chacun d’entre vous, convaincus, mettre ce système capitaliste aux oubliettes de l’histoire.  Ce système ne peut être réformé. Il doit disparaître. » 
C’est au nom de toutes les composantes de la FGTB de Charleroi (la 2ème régionale de la FGTB wallonne en nombre d’affiliés) qu’il ajoute : « Combien de temps allons-nous encore, Camarades, nous laisser tondre la laine sur le dos ? Quel est le déclic dont nous avons besoin pour que la peur change de camp ? »
Après avoir passé en revue  les dérobades, reculs (sinon trahisons) des sociaux-démocrates, estimant « qu’à force de composer, on se décompose, on se dilue.  Et pour l’instant, c’est la gauche qui se dilue dans la droite » le responsable de la FGTB a lancé un appel sans ambigüité : « Aujourd’hui, camarades du PS, la politique du moindre mal ne passe plus chez nos militants. La phrase magique « ce serait pire sans nous » fait offense à leur intelligence. (…) Ce que nous lançons comme appel, c’est un appel à rassembler à gauche du PS et d’ECOLO.  Il y a là des forces vives, actives, militantes et anticapitalistes porteuses d’espoir pour le monde du travail. Je sais que cela ne sera pas chose facile, mais si chacun peut faire un pas vers l’autre, PTB, LCR, PSL, PC, gauche chrétienne peut-être, gauche du PS et d’ECOLO s’il en reste, sûrement, nous pourrons certainement , nous l’appelons de toutes nos forces, renouer avec l’espoir pour le monde du travail. (…) Et ce, en toute indépendance syndicale s’entend. »
Un simple discours de 1er mai ? Non, car Daniel Piron précise immédiatement : « Mais se contenter de l’affirmer du haut de cette tribune ne suffit pas.  Faut-il encore nous en donner les moyens et le relais politique pour concrétiser notre objectif. »
Et d’insister sur la méthode : « Mais l’indépendance syndicale n’est pas synonyme d’apolitisme.  Et chacun sait l’importance d’un relais politique. Nous n’agirons toutefois nullement dans la précipitation.  Loin de nous cette idée de construire cette force à gauche du PS et d’ECOLO dans les prochains jours ou prochaines semaines. Un travail en profondeur reste à mener d’abord avec nos militants même si nous sommes convaincus qu’ils partagent notre vision. C’est eux qui l’ont générée. Après les élections communales, sur base du programme de la FGTB, nous interpellerons les forces de gauche (…) et nous mesurerons à quel niveau elles partagent nos valeurs et nos objectifs. »
Chacun doit prendre ses responsabilités
Si ces déclarations ont été chaleureusement applaudies par les centaines de militant(e)s syndicaux(ales)  présent(e)s à Charleroi, il faut bien constater que cet appel n’a pas encore reçu l’accueil qu’il est en droit d’attendre au sein des différentes composantes de la gauche. Le PS minimise : « on est habitué à ces crises cycliques ».
Du côté de certains pontes syndicaux, coincés dans leurs vieilles habitudes aux accents « sous-régionalistes », on n’hésite pas à ressortir les vieilles rengaines sur le thème « l’important c’est de rassembler »... Critiquer le PS un matin et se « rassembler » avec lui dans l’Action Commune Socialiste le lendemain ? De faux arguments d’unité pour éviter de  répondre aux questions clés. « Le Soir » du vendredi 4 mai donnait le ton de ces pseudo-arguments et tirait déjà une conclusion provisoire « Retour au début : en définitive, il ne se passera peut-être pas grand-chose de neuf à la gauche de la gauche, même s’il se passe indéniablement quelque chose à Charleroi… »[1]

Peu d’échos aussi du côté des petites organisations de la gauche pourtant  si promptes à s’autoproclamer « incontournables ». A titre d’exemple, du côté du PTB, la page Facebook du parti à Charleroi est restée muette et le site national se limitait jusqu’au 4 mai à dire quelques mots, assez flous, sur la prise de position de la FGTB-Charleroi « (qui) nourri de grands doutes quant à la volonté du PS », escamotant la proposition pourtant adressée clairement au PTB dans le discours de Daniel Piron. D’une semaine à l’autre, la différence est troublante : les dirigeants du PTB qui avaient si bien courtisé Bernard Wesphael ont fait bien peu de cas de la proposition d’une organisation comptant plus de 100.000 affiliés… D’autres, trop occupés à la préparation des listes pour les élections communales, semblent  empressés de tourner cette page du 1er mai 2012 : n’est-il pas plus simple de se cantonner  à une intervention  propagandiste abstraite sur la nécessité de « construire un parti des travailleurs » que de mettre la main à la pâte ?

Au boulot !
Le discours de 1er mai de la FGTB Charleroi a un immense mérite : il ouvre, enfin, le débat à gauche autrement que par le petit bout de la lorgnette. Ce que propose la FGTB Charleroi est d’une autre nature que les habituels « cours sur l’unité » qui s’ouvrent avant chaque scrutin et se referment aussitôt après… A Charleroi, mais aussi dans les autres régions, ce n’est pas tous les jours que, des rangs syndicaux, monte une analyse et surtout des propositions pour sortir de l’impasse dans laquelle la social-démocratie a conduit les travailleurs. Je ne doute pas que des responsables syndicaux sincères  mettront de côté leurs particularismes et leurs (petites) divergences, pour enrichir ce débat crucial pour le mouvement ouvrier.  Si c’est le cas les « petits réflexes des petits appareils » apparaîtront pour ce qu’ils sont : anecdotiques…
Personnellement je pense que les militantEs (et les organisations, bien entendu) doivent sortir de leur torpeur et saisir cette main tendue par l’organisation syndicale. Dans le texte qu’il a publié, Freddy Bouchez a totalement raison d’écrire « Celles et ceux qui aujourd’hui, dans ou à l’extérieur du mouvement syndical, prennent des initiatives pour concrétiser cette recomposition à gauche sont à soutenir. Nous devons nous engager avec eux pour que ce nouveau parti anticapitaliste devienne réalité. »[2]
J’espère que dans d’autres régions, au sein des organisations syndicales, dans les milieux associatifs et chez tous les « indignés », des militants vont s’approprier ce chantier et se (re)mobiliser. Je pense à tous ceux qui en décembre 2011 ont râlé comme pas possible quand le PS les a ignorés en faisant passer en trombe les mesures sur les fins de carrière. Je pense aux militants que Rudy Demotte a traités « d’intempérants » et à ceux que Di Rupo a accusé de « conduire le peuple vers l’abîme » (lors de la présentation de leurs « bons » vœux…). Je pense aux travailleurs sans emploi et particulièrement aux jeunes qui vont se faire jeter par dizaines de milliers d’ici quelques mois. Je pense à tous ces militants qui ont contribué au succès de la grève du 30 janvier et aux actions du 29 février et qui savent que, comme en Grèce, en  Espagne et au Portugal, les politiques d’austérité drastique sont passées grâce aux « socialistes ». Qui savent que sans se dégager de cette impasse politique, le mouvement syndical est condamné à subir de lourdes attaques ou devenir, au mieux, un rouage du système.

Freddy Mathieu


[1] Le Soir 04/05/2012 « Le PS écorché sur son flan gauche » page 4

jeudi 1 décembre 2011

[Plan d’action syndical : apprendre le grec!]


Plan d’action syndical : apprendre le grec!

Ce 15 novembre, au Heysel, les organisations syndicales ont donné le coup d’envoi de la mobilisation contre les plans concoctés par les partis qui négocient la formation d’un gouvernement. Six à sept mille participants: le Front Commun se félicite de ce succès mais, s’agissant en majorité de délégués et du cadre permanent des trois organisations, il est bien difficile d’en tirer déjà des indications de la mobilisation réelle que les dirigeants sont prêts à poursuivre. Anne Demelenne a annoncé une grande manifestation le 2 décembre et "n’a pas exclu" une grève générale fin décembre (le 19?).
A plusieurs reprises, la question grecque est venue sur le tapis. Il est vrai que nous avons quelques similitudes avec la Grèce: 10 millions d’habitants, un parti social-démocrate (le PASOK) au pouvoir menant une offensive contre les classes populaires et appelant la droite à terminer le boulot avec lui (en Grèce c’est même l’extrême-droite, qui a voté tous les plans d’austérité au parlement!)… Il n’est sans doute pas inutile pour nous d’essayer de tirer des leçons de ce qui s’est passé là-bas.

Mobilisation sans précédent
Ce jeudi 1er décembre devant le parlement
Depuis les manifestations et les émeutes de décembre 2008 – qui faisaient suite à la mort d'un adolescent de 15 ans tué par balle par la police, mais étaient surtout révélatrices du désenchantement de toute une jeunesse, la "génération 600 €," la Grèce a connu de grands mouvements: pratiquement un arrêt de travail généralisé tous les deux mois, des manifestations de plus en plus nombreuses (15 en 18 mois, dans plus de 70 villes), une radicalisation de la jeunesse et de pans entiers de la société. Les 19 et 20 octobre, il s’agissait du cinquième arrêt de travail généralisé depuis le début de l’année, et du deuxième arrêt de 48 heures depuis la fin juin. Poussées par cette dynamique, les directions syndicales, malgré leurs lourdeurs et leurs liens avec le PASOK, ont contribué à ces mobilisations, tout en espérant s’en servir pour "négocier" avec le pouvoir quelques "aménagements" des mesures d’austérité.
Cette mobilisation croissante n’a pourtant pas suffi (pour le moment) à contrecarrer l’offensive coordonnée de l’UE, du FMI et de la BCE. Pour quelles raisons?

mercredi 30 novembre 2011

[Un réel appauvrissement des pensionnés, des travailleurs et des chômeurs]

 Un réel appauvrissement des pensionnés, des travailleurs et des chômeurs
Par Peter Veltmans
 
Après plus de 500 jours, il se peut qu’il n’y ait toujours pas de gouvernement. Après les questions communautaires, c’est maintenant le budget qui agite les trois familles politiques traditionnelles. Les négociations traînent en longueur depuis des semaines. Au moment d’écrire ces lignes (1), on nous annonce une énième journée « cruciale » de négociation. On attend de voir si le PS, le SPa, le CD&V, le CDh, l’Open VLD et le MR réussiront à arracher un accord. Une chose est sûre pourtant : la classe des travailleurs va payer le prix fort pour ce budget.
Le cadre européen
Ce budget a pour cadre « L’Europe » en lieu et place des rapports de forces politiques belges. Le Traité de Maastricht (1993) a tracé le cadre d’une Union économique et monétaire (la future « Zone euro ») qui allait de pair avec l’imposition d’une discipline budgétaire aux Etats-membres. En 1997, on y a ajouté le Pacte de Stabilité et de Croissance. Un jugement de la Cour européenne de Justice du 13 juin 2004 stipule que les Etats-membres qui transgressent les normes de ce Pacte de Stabilité peuvent se voir imposer une amende par la Commission européenne. Une telle amende trouve encore son meilleur point de comparaison avec les réparations que le Traité de Versailles a imposées à l’Allemagne après la Grande Guerre.

jeudi 26 mars 2009

Le mouvement syndical européen lance une campagne de mobilisation marquée par quatre manifestations européennes du 14 au 16 mai prochains – le 14 mai à Madrid, le 15 mai à Bruxelles et le 16 mai à Prague et Berlin. Cette vaste campagne de mobilisation sera l’occasion de rappeler aux différents gouvernements qu’ils doivent apporter des réponses européennes pour régler cette crise et non pas prendre des mesures au cas par cas. La Confédération européenne des syndicats (CES) comprend actuellement 82 organisations membres, issues de 36 pays de l’Europe de l’Ouest, centrale et de l’Est, et 12 fédérations syndicales. La CES représente les intérêts de 60 millions de syndicalistes au niveau européen. La CES appelle à « un nouveau Deal social donnant la priorité aux travailleurs et citoyens. Cet agenda social devra garder le cap sur les principales préoccupations des citoyens européens : l’emploi, le pouvoir d’achat et leurs droits fondamentaux ».

60 millions de syndicalistes, c’est un chiffre qui fait rêver… Et combien la CES compte t’elle en mettre dans la rue en mai? 60.000 ? 100.000 ? C’est en tout cas ce que semble « espérer » les dirigeants de la CES.

Car encore une fois, ce sont des manifestations « contingentées » qui sont mises sur pied. Contingenter - limiter - rationner - borner - circonscrire - restreindre - délimiter - démarquer - arrêter - réduire - localiser - plafonner - entourer - cerner - cantonner… Prenons l’exemple de la manifestation de Bruxelles, elle reposera essentiellement sur les syndicats belges et hollandais. On connaît déjà les quotas : 6000 pour la CSC, 6000 pour la FGTB, 6000 pour les libéraux… Et ainsi de suite jusqu’au niveau régional de chaque syndicat. Les syndicats des pays voisins seront eux-mêmes limités par les difficultés de transports (coûts, distances,…).

Ce type de « mobilisation » aboutit à écraser la réelle mobilisation à la base, on crée une couche de « manifestants professionnels » (au bout de la 12ème, une casquette gratuite), dont la sincérité n’est pas à mettre en cause, mais qui ne s’ancre pas dans aucune conscientisation des autres 59,900 millions de syndicalistes qui n’ont pas eu « la chance » de gagner le voyage, à Bruxelles, Madrid, Berlin ou Prague. Les « autres » militants ne sauront peut-être même pas qu’il ya une manif… Tout au plus les différentes organisations se « mesurent » entre-elles au nombre de drapeaux, quand elles prennent la peine de se déplacer. Et on est bien loin des 10 millions de manifestants qui sont descendus dans les rues de France, Espagne, Italie, Grèce ces six derniers mois.

Dans le même temps les principales organisations nationales programment des actions à leur niveau. Pourquoi l’Exécutif de la CES dans lequel elles siègent n’est-il pas capable de décider une date commune de mobilisation pour (au moins) un paquet significatif de pays ? Pourquoi ne pas avoir tenté de synchroniser les mouvements en Espagne (éparpillés sur tout le mois de mars), en Grèce (grève Générale le 2 avril), en Italie (grèves régionales en mars et big manif le 4 avril à Rome), en France ? Pourquoi la CES ne répercute t’elle pas des échos des mobilisations en cours dans différents pays ? Alors qu’ils les critiquent souvent les dirigeants de la CES font tout pareil à leurs gouvernements nationaux qui ne sont jamais responsables des décisions européennes qu’ils prennent pourtant ensemble dans différents sommets, l’Europe sert alors d’éteignoir aux revendications.

Et pourtant nous avons besoin d’un syndicalisme de combat au niveau européen, un syndicalisme de réseaux qui enrichit les luttes d’entreprises dont les contours dépassent tellement souvent les frontières nationales. Les « nouveaux » pays européens ont besoin de l’expérience des grandes organisations, les plus « faibles » ont besoin de la force des plus « forts ».

Un vrai contre-pouvoir syndical européen reste à construire dans les luttes car toutes les politiques de recul social sont élaborées au niveau européen, ce n’est pas pour rien que ces 30 dernières années, celles de la dérégulation, sont aussi celles de l’approfondissement de l’Europe du capital, celle qui écrase les petites gens.

Pour empêcher la destruction de millions d’emplois à cause de la crise capitaliste qui elle s’est propagée à travers toute la planète, il faut bâtir un front des luttes au niveau européen.

fRED

dimanche 27 janvier 2008

C'est tout bénéfice!

La question du pouvoir d'achat est revenue à l’avant-scène ces derniers temps, en France et en Belgique notamment. Car les gens voient bien chaque jour combien il est difficile de faire face à l’augmentation des prix. Mais certains ne veulent pas entendre parler d’augmentations salariales…
Le patron des patrons flamands Urbain Vandeurzen a déclaré dans ses vœux, le 14 janvier 2008 : « Pour augmenter le pouvoir d’achat, il n’y a qu’une solution : c’est de tous travailler plus, plus dur et plus longtemps.»
Dans ses vœux aux "forces de la Nation", tout en revenant sur cette question, le président Nicolas Sarkozy a une nouvelle fois affirmé que la seule façon de l'améliorer était de travailler davantage. "J'ai dit que je dirai aux Français la vérité. La vérité, la voilà : promettre plus de pouvoir d'achat aujourd'hui sans contrepartie, c'est la certitude d'avoir encore un peu moins de pouvoir d'achat demain, sous le poids des prélèvements obligatoires qui augmenteront et d'une dette qui s'accumulera", a déclaré le chef de l'Etat. "Lorsque certains font croire aux Français qu'il serait possible de distribuer du pouvoir d'achat tout de suite, sans travail et sans réformes, je reconnais la démagogie qui a fait tant de mal à notre pays depuis trois décennies", a-t-il poursuivi. "Il n'y a pas de création de richesses, pas de redistribution possible, pas de pouvoir d'achat sans travail. Certains aujourd'hui feignent de ne pas le comprendre", a regretté le chef de l'Etat. "Ce que nous voulons, c'est qu'en travaillant davantage on puisse augmenter son pouvoir d'achat", a-t-il insisté. "Partout dans le monde, ils encouragent le travail, depuis des décennies en France on l'a découragé (...) nous voulons libérer le travail", a martelé le chef de l'Etat. Chez nous, la Fédération des entreprises de Belgique (FEB) et le VOKA (patronat flamand) ont tous deux appelé à arrêter « l’hystérie salariale et la folie qui s’emparent des travailleurs grévistes » après des grèves en Flandre au cours des dernières semaines.
Travailler plus pour quoi ?
Pour le monde patronal comme pour la droite politique qui se fait écho de ses intérêts, le discours est trompeur le « travailler plus pour gagner plus» veut dire « vous devez travailler plus pour conserver notre compétitivité ». Un discours pratique car il permet d’éviter de parler des profits colossaux engrangés par les entreprises et de la répartition de ces richesses.
La FEB donne le ton dans sa dernière Newsletter : « Pas de pouvoir d’achat sans compétitivité. Tel était le message des négociateurs de la FEB lors de la rencontre qui a eu lieu la semaine dernière entre le Groupe des 10 et le gouvernement. Les syndicats réclament des mesures visant à renforcer le pouvoir d’achat des travailleurs et des allocataires sociaux pour faire face à l’inflation accrue. A ce sujet, la FEB a mis en garde contre une répercussion de ces exigences sur les entreprises via une augmentation des rémunérations brutes. En effet, un tel scénario éroderait la compétitivité des entreprises, entraînant ainsi la suppression d’emplois.»
Les faits sont là. Sur les 25 dernières années (1980-2005), le produit intérieur brut de la Belgique (la richesse produite chaque année) a augmenté de 62,5%. Les salaires ont augmenté de 38 %, mais la productivité, elle, a fait un bond de 57 %. C’est ce qui explique que le partage du revenu national entre les travailleurs et le capital est passé de 70 % - 30 % à 60 % - 40 %. Depuis le début des années 80, la part des salaires dans le PIB de la France a baissé de 9,3%. 9,3% équivalent à plus de 150 milliards d'euros : soit une douzaine de fois le trou de la Sécu en France! Un hold-up géant, renouvelé chaque année, au détriment des salariés. Depuis le début de la politique néolibérale en Belgique, faite d’austérité et de modération salariale, un gigantesque transfert de richesses s’est produit, des travailleurs vers les riches. En 1981, année de crise économique, les profits des entreprises représentaient 20 milliards de francs belges. Six ans seulement plus tard, ils pesaient déjà 167 milliards, soit 8 fois plus. Dix ans après, en 1997, les profits atteignaient 1.240 milliards de francs. Pendant cette même période (de 1981 à 1997), les prix ont augmenté d’environ 60 % sous l’effet de l’inflation. Les 1.240 milliards de francs de 1997 représentaient donc 775 milliards en francs de 1981. Les profits (inflation déduite) de 1997 étaient donc 4,5 fois plus élevés qu’en 1987 et... 39 fois plus élevés qu’en 1981.
Tout le monde est gagnant au jeu du bénéfice…
C’est sous ce titre que la FEB réagissait en 2006 à des critiques jugées « démagogiques » à propos de la hauteur des bénéfices.
« Ces derniers temps, certains milieux politiques et syndicaux stigmatisent les "bénéfices plantureux" des entreprises, qu'ils vont même jusqu'à qualifier de contraires à l'éthique. Comme elle l'a fait à la fin de l'année dernière en rétablissant la vérité à propos du Contrat de solidarité entre générations, la FEB s'en prend aujourd'hui à la démagogie qu'inspirent les bénéfices des entreprises. Les bénéfices récemment dévoilés par quelques grandes entreprises font couler beaucoup d'encre dans certains milieux politiques et syndicaux. A les en croire, ces "bénéfices monstres" manqueraient d'éthique. La FEB entend démonter ici le caractère démagogique de ces affirmations par le seul biais de chiffres et de faits. N'oublions surtout pas que les bénéfices constituent le moteur de notre bien-être et la condition indispensable à la création de nouveaux investissements et de nouveaux emplois.
Assertion : “Les entreprises établies en Belgique font de gros bénéfices” LES FAITS : Les bénéfices récemment rendus publics dans les médias sont l'apanage d'un nombre limité de grosses entreprises souvent cotées en bourse et actives au plan international. Il est un fait que leurs résultats 2005 sont globalement plus prospères que ceux des années antérieures. Mais, ces résultats sont généralement consolidés à l'échelle d'un groupe entier ; autrement dit, ils ont été réalisés à la fois sur le sol national et à l'étranger. Ils ne portent donc pas exclusivement sur des activités belges. Les chiffres communiqués ne donnent, de plus, aucun indice quant aux résultats obtenus par de nombreuses PME et entreprises familiales. C'est donc emprunter un raccourci fort hasardeux que d'affirmer que la rentabilité globale (de toutes les entreprises en Belgique) est florissante. Assertion : “Mieux encore : ces bénéfices sont gigantesques” LES FAITS : Ce n'est que depuis 2002 que le panorama global des résultats de nos entreprises enregistre une embellie. Cette amélioration succède toutefois à une période de régression pratiquement continue - depuis la fin des années 80 - de la part que représentent les bénéfices du monde économique belge dans notre bien-être. Sous l'effet de ce regain de forme, la rentabilité retrouve aujourd'hui une valeur proche de la moyenne des vingt dernières années. Dans cette perspective, il ne peut être question de bénéfices exagérément élevés. » [lire]
La même FEB écrivait pourtant un an plus tard, en juin 2007, un couplet un peu moins « alarmiste » : « La Belgique connaît actuellement un taux de croissance supérieur au rythme de long terme. Après avoir connu une année 2006 au-delà de toute espérance il y a encore quelques trimestres, l’économie belge devrait continuer à croître à un rythme élevé bien qu’inférieur à ce que nous avons enregistré précédemment. »
En effet, pendant la dernière décennie (1997-2006), les patrons n’ont pas vu fondre leurs profits. Tout au plus, à cause d’une croissance plus faible, le rythme d’augmentation a-t-il ralenti.
En 2003, les profits des entreprises étaient de 37 milliards d’euros ! Inflation déduite, on arrive ainsi à l’équivalent de 870 milliards de francs de 1981, soit plus de 43 fois le montant de 1981 ! Et puisque la FEB reconnaît que ces bénéfices connaissent une embellie depuis 2002, il y a fort à parier qu’en 2004, en 2005, en 2006 et en 2007, la progression a continué.
Tout le monde est gagnant, vraiment ? Alors, certains un peu plus que d’autres !
fRED