637 jours après l’appel de la FGTB Charleroi le 1er mai 2012, des
listes de rassemblement intitulées PTB-GO ! ont été présentées
officiellement à la presse. Objectif : faire entendre une voix de gauche
dans la campagne pour les élections de mai 2014, et offrir la
possibilité d’un vote utile à gauche de la gauche. La LCR se réjouit du
fait que se regroupent ainsi autour du PTB des personnalités
indépendantes, des militants syndicaux et associatifs ainsi que le PC et
la LCR, dans le respect de l’identité et des spécificités de chacun.
Gauche d’ouverture
La dynamique lancée le Premier Mai 2012 par les syndicalistes de
Charleroi reçoit ainsi une première concrétisation. La Conférence de
Presse de lancement de PTB-GO ! est à l’image de cette dynamique : une
quinzaine de personnalités de milieux divers ont en effet présenté un
Appel (voir le texte ci-dessous) qui débute par ces mots : « Il est des
rendez-vous qu’il ne faut pas manquer ». Elles l’ont fait en présence
des principaux membres du Comité permanent de la FGTB de Charleroi, non
signataires de l’Appel, mais venus se réjouir publiquement du fait
qu’un premier pas ait été franchi dans le sens de leurs prises de
position.
Hugues Lepaige : « L’appel de la FGTB carolorégienne a constitué un moment fondateur »
Présentant la conférence de presse, Hugues Lepaige (journaliste et
réalisateur), a campé brièvement l’initiative de l’Appel « Il y a des
rendez-vous qu’il ne faut pas manquer ». « L’appel de la FGTB
carolorégienne a constitué un moment fondateur. Nous nous inscrivons
dans cette dynamique », a-t-il dit.
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Carlo Briscolini |
Carlo Briscolini : « Un syndicat fort sans un parti fort à gauche, c’est une voie sans issue »
Au nom des responsables de la FGTB de Charleroi, presque tous
présents, Carlo Briscolini, président de la régionale, s’est félicité du
fait que trois partis de gauche aient pu se regrouper, avec l’appui de
personnalités indépendantes. « Nous nous réjouissons de cette première
étape dans la réponse à notre appel du Premier Mai 2012, a-t-il
déclaré. » Rappelant les principes de l’indépendance syndicale, il a
noté que les 30 années écoulées n’ont été qu’un long tunnel d’austérité
sans fin. « La gauche de gouvernement nous promet toujours que demain ça
ira mieux mais il n’y a jamais de lendemain pour les syndicats »,
a-t-il résumé. Et de conclure : « Un syndicat fort sans un parti fort à
gauche, c’est une voie sans issue ».
Irène Pètre : « Une gauche gouvernementale qui fait payer la crise aux plus fragiles peut-elle encore s’appeler gauche ? »
Irène Pètre a rappelé l’événement de la Géode, au cours duquel
Isabelle Wanschoor, au nom de la CNE, a soutenu l’appel de la FGTB de
Charleroi et salué le courage de ses dirigeants. Elle aussi a souligné à
quel point la CNE est attachée à l’indépendance syndicale. Elle a
attiré l’attention sur le fait que Felipe Van Keirsbilck, secrétaire
général de la Centrale, s’est exprimé en faveur d’un rassemblement à
gauche du PS et d’Ecolo. « Le plus dur à supporter, pour les
syndicalistes, a été le vote du Traité budgétaire européen : la gauche
s’est lié les poings et les pieds, elle renonce aux politiques
sociales. » Pointant l’exclusion de 55.000 chômeurs, dont une majorité
de femmes, l’ex-secrétaire de la CNE pose la question : « Une gauche
gouvernementale qui fait payer la crise aux plus fragiles peut-elle
encore s’appeler gauche ? » Et de dénoncer la mise à l’écart des
syndicats, empêchés de faire leur « core business » par la politique
gouvernementale.
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Irène Pètre, Daniel Tanuro, Isabelle Stengers |
Daniel Tanuro : « Ceci n’est pas une crise mais une impasse sociale et écologique du capitalisme »
Daniel Tanuro (LCR) a parodié Magritte : « ceci n’est pas une
crise », a-t-il dit, mais une double impasse du capitalisme, sociale et
écologique. La social-démocratie et les verts trompent leurs électeurs
en disant qu’on en sortira par des sacrifices: outre que ceux-ci rendent
les riches plus riches et les pauvres plus pauvres, ils ne permettent
pas tracer une sortie de crise socialement juste, démocratique et
écologiquement soutenable. Les mouvements syndicaux ont donc besoin d’un
nouveau relais politique, anticapitaliste. C’est le sens de l’appel de
la FGTB de Charleroi. A la LCR, nous avons estimé que cet appel ne
pouvait pas rester sans au moins un début de concrétisation dans les
élections de 2014. Les listes PTB-GO ! sont une solution créative pour
concilier le sigle PTB et l’appel au rassemblement. La LCR s’y engage
avec enthousiasme. Nous ferons tout pour que des représentants soient
élus. Mais nous maintenons notre identité. Nous appellerons à voter
préférentiellement pour nos candidat-e-s, pour une alternative non
seulement anticapitaliste mais écosocialiste – car il faut sortir du
productivisme, non seulement anticapitaliste mais féministe – car il
faut sortir aussi du patriarcat ».
Jean Fagard : « Nous avons constaté des évolutions, de part et d’autre, et des convergences »
Jean Fagard a rappelé la longue expérience du PC en matière de
rassemblement à gauche. « Nous avons estimé qu’il était inutile, voire
nuisible de présenter des listes séparées, a-t-il dit. De plus, nous
avons constaté des évolutions, de part et d’autre, et des convergences.
Par exemple sur la défense des services publics, le logement et les
revendications sociales en général. » Et Fagard de rappeler que le PC à
Liège a déjà eu une expérience de liste commune avec le PTB. En
conclusion, il a souligné que le PC s’inscrit lui aussi dans le cadre de
l’appel lancé par la FGTB carolo, et précisé que la participation de la
LCR au rassemblement avait été un élément important dans la décision
prise par son parti.
Isabelle Stengers : « On nous dit que nous n’avons pas le choix, mais nous avons le choix de la révolte »
Isabelle Stengers en aura surpris plus d’un-e en disant qu’elle
n’avait pas hésité une seule seconde à rejoindre l’initiative. En
cause : l’émission de la RTBF collant l’étiquette « populistes » au PTB
et amalgamant ce parti à Aube Dorée. « Voilà comment seront traités tous
ceux qui osent l’insoumission à une société dans laquelle il y a une
absence totale de perspectives, a-t-elle déclaré. Je soutiens cette
initiative parce qu’elle permet de nous opposer à tout ce qui nous
demande de nous soumettre à une société sans issue. On nous dit que nous
n’avons pas le choix, mais nous avons le choix de la révolte. »
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Jean Fagard, Josy Dubié, Raoul Hedebouw, Hugues Lepaige |
Josy Dubié : « Jamais dans l’histoire on n’a produit autant de richesses aussi mal réparties »
Josy Dubié s’est réjoui de la présence nombreuse des syndicalistes à
cette conférence de presse. Attirant l’attention sur les désaccords
qu’il a avec le PTB, il a ensuite souligné l’évolution positive de ce
parti, concrétisée notamment dans le fait que le livre de Raoul Hedebouw
comporte un long chapitre sur l’écologie. « Car en effet nous devons
mettre en cause le productivisme. Il faut produire, mais aussi respecter
l’environnement, les pauvres sont les premières victimes des
catastrophes écologiques ». Comme d’autres, J. Dubié a condamné
l’attitude des partis traditionnels sur le Traité budgétaire européen :
« Il instaure une austérité sans fin alors que l’austérité est le
problème, pas la solution ». Citant le rapport d’Oxfam sur l’inégalité
sociale (les 85 plus riches possèdent autant que 3,5 milliards
d’individus), il a dénoncé la fracture sociale : « jamais dans
l’histoire on n’a produit autant de richesses aussi mal réparties ».
Raoul Hedebouw : « Une gauche de principes, décomplexée et plurielle »
Raoul Hedebouw a conclu que le succès des listes PTB-GO ! ferait du
bien à toute la gauche parce qu’il permettrait de rouvrir les débats sur
les grands enjeux. Citant en exemple l’adoption du traité budgétaire
« passé somme une lettre à la poste », il a dénoncé l’absence de tout
débat à ce sujet dans les parlements. Parlant du rassemblement, il a
dit : « Le PTB a tendu la main, c’est un point de départ, au-delà des
élections, le débat permettra d’aller plus loin ». Et de rappeler que le
PTB est un parti national, partisan d’une « gauche de principes,
décomplexée et plurielle ».
En réponse à une première question sur le poids que la gauche
radicale pourrait avoir face à la droite flamande, Raoul Hedebouw a
souligné : « On nous pousse depuis trente ans à des réponses
individualistes ; la droite répond à ce « je » par un
« nous nationaliste», l’enjeu pour la gauche est de reconstruire un
« nous » des travailleurs.
Interpellé sur l’efficacité qu’auraient un ou deux élus dans les
assemblées, il a répondu que l’histoire s’est construite ailleurs qu’au
parlement et que les élus PTB-GO! seraient le relais d’un rapport de
forces à construire dans la rue.
C. Briscolini : « Après les élections, nous serons derrière eux pour les contrôler »
Interrogé à son tour, Carlo Briscolini a rappelé que le combat de la
FGTB de Charleroi pour un rassemblement anticapitaliste à gauche du PS
et d’Ecolo était un combat de long terme. « Nous ne sommes pas des
sprinters mais des marathoniens. Dans ce processus, personne n’est
exclu, nous nous adressons aussi aux membres du PS et d’Ecolo.
S’adressant au PTB, au PC et à la LCR, le président de la FGTB carolo a
déclaré : « Après les élections, nous serons derrière eux pour les
contrôler, sur base de notre programme d’urgence en dix points ».
Evoquant la culture de débat nécessaire à la gauche, Carlo a souligné
l’importance d’un débat en profondeur, qui ne se limite pas aux cadres
dirigeants, un débat dans lequel il a plaidé pour un « droit de
tendance » : « c’est quand il y a de la discussion, de la contestation,
que différentes tendances s’expriment qu’un débat permet d’avancer »,
a-t-il conclu.