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20.2 : Qui paie ses dettes…
Généreuse Europe…
«Nous aiderons la Tunisie dans sa transition démocratique» «Nous allons augmenter les aides pour la Tunisie: 258 millions d’euros d’ici 2013, et déblocage immédiat de 17 millions d’euros» Catherine Ashton, 1ère vice présidente de la Commission Européenne.
Voilà ce qui s’appelle un effet d’annonce…
Mais à mettre en regard d’autres chiffres !
« La Presse » - 19/02/2011 : La Tunisie nouvelle fait face à d’énormes défis, politiques et institutionnels, économiques et dans la gestion des affaires publiques et privées, sociales et dans l’équilibre du territoire. Il lui faut aussi faire face à deux conséquences urgentes aux récents évènements libérateurs, le sort des victimes et leurs proches et le manque à gagner, notamment dans le secteur du tourisme. Un besoin global chiffré à près de 5 milliards de dinars (plus de 2 milliards d’euros).
(…) Pour tout «coup de pouce» substantiel, Mme Ashton n’a proposé à Tunis «que» 258 millions d’euros pour la coopération classique et 17 millions d’euros en aides exceptionnelles. A y regarder de près, l’offre est en trompe-l’œil. Les 258 millions représentent l’addition de 240 millions d’euros déjà accordés au titre de l’aide triennale habituelle (2011-2012-2013) plus des montants pris sur des dotations déjà proposées (initiatives sur les droits de l’Homme ou au profit de la société civile) : simple raclage de fond de tiroir. Il y aurait pu avoir, au moins, un simple rattrapage sur la dotation triennale précédente : 330 millions d’euros. Elle avait été ramenée depuis à 240 millions pour marquer la méfiance que lui inspirait la gestion passée du pays. Le passage à la démocratie n’aura rapporté que 17 millions d’argent «frais».
Fathi Chamkhi (Raid- ATTAC Tunisie) :
100 millions d’euros pour contenir les flux de migrants tunisiens.
[La Dette] de la Tunisie va être une problématique importante pour l’avenir du processus révolutionnaire. Autour de cette question vont se cristalliser les divergences entre ceux qui ne voulaient qu’un « petit nettoyage de printemps » et ceux qui veulent aller jusqu’au bout de la révolution.
Car l’endettement de la Tunisie est pratiquement parallèle au règne de Ben Ali. Règne pendant lequel il a soumis son pays à la logique de la mondialisation néolibérale.
Arrivé au pouvoir en 1987, il adhère au GATT en 1990, à l’OMC en 1995 et la même année il signe un accord avec l’Union Européenne, tendant à intégrer la Tunisie dans la zone de libre-échange de l’Europe en 2008. En attendant le statut avancé (au même titre que le Maroc et Israël) la Tunisie et l’UE sont actuellement liées par un Accord d’association (le premier à lier, depuis 1995 un pays du sud de la méditerranée à l’UE) et un Plan d’action de politique européenne de voisinage expiré en 2010 et en cours de renégociation Ces accords assortis d’importants financements européens ont déjà permis l’instauration d’un partenariat économique et stratégique avec l’abolition des barrières douanières sur les produits manufacturés ainsi qu’une collaboration en matière de sécurité et de flux migratoires.
Aujourd’hui la Tunisie se voit contrainte (comme beaucoup de pays « conseillés » par les grandes institutions économiques internationales) de s’endetter afin de payer une dette qui ne diminue pas. Malgré la privatisation de plus de 200 entreprises d'État au cours des 20 dernières années. Notons au passage que ces privatisations se sont déroulées de manière totalement catastrophique pour la Tunisie. On peut parler d’une liquidation, le produit total de ces 20 années de vente étant estimé à 1,4 Mrds de dollars soit moins que le montant consacré annuellement au service de la dette. L’argent des emprunts nouveaux sert d’abord à rembourser le service de la dette.
Autre résultat, plus des trois quarts des entreprises privatisées sont passées aux mains du capital européen. Des entreprises qui continuent aujourd’hui à creuser le gouffre de la dette publique tunisienne. Les entreprises étrangères ou mixtes qui travaillent exclusivement ou quasi exclusivement à l'exportation, bénéficient, en effet, d'une liste impressionnante d'avantages fiscaux qui vont de l'exonération totale de l'impôt sur les bénéfices et des droits de douane au libre transfert des bénéfices réalisés en passant par la prise en charge totale par l'État des contributions patronales à la Sécurité sociale.
Bref ce que l’on nomme pudiquement la dette n’est rien d’autre qu’un holdup grandiose, des sommes colossales passant de la poche du peuple tunisien dans celles des hommes d’affaires. Dans ce grand casino, Ben Ali et ses sbires jouaient à la fois le rôle de portier, de croupier et d’associés, se servant royalement au passage.
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